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vendredi 1 avril 2016

Les vases communicants (53) : Anne-Sophie BRUTTMANN

Dans le cadre des vases communicants d’avril 2016

Ne pas écrire pour, mais écrire chez l’autre...

J’aurai le grand plaisir d’accueillir Anne-Sophie BRUTTMANN dont les mots sont habituellement ici.

Autour d’une photo proposée et partagée et mise en mots.


La Baume Les Aix - mars 2016 - DM


Je n'avais jamais quitté la ville. J'avais toujours vécu dans ces réseaux de rues inextriquées, ponctuées de squares, de pigeons et de hauts murs. Je suis une fille sans mystère, disponible et sans rendez-vous fixes. Je travaille dans une banque. Comment ai-je un jour atterri là, je ne m'en souviens pas. Je possède la clé du sous-sol qui mène aux coffres, il faut croire que ma tête inspire confiance. Régulièrement des types se pointent pour aller déposer quelque chose ; tous ces types plein de diamants, de lingots ne m'intriguent pas. Je suis une fonctionnaire de porte : j'ouvre, je ferme, tape un code, accessoirement j'accompagne ces hommes qui ont tous la même tête, les mêmes enveloppes marrons, les mêmes mallettes. Sans moi ils ne peuvent rien. Avec ma clé j'accède à leurs désirs profonds, mettre en sûreté l'argent, les possessions, l'avoir. Je peux les observer de dos quand ils avancent dans le long couloir. Ils ont les mêmes dos qui dissimulent, ils ne parlent pas, ils avancent et ont hâte que ma clé ouvre leur paradis. Je vais, je viens, évidemment ce n'est pas régulier mais pas un jour ne passe sans un accès aux boîtes. Ils cachent des espèces, des faux papiers ou des testaments. Cette clé les guide et les inspire, les fait bander. Parfois dans un angle mort sans caméra je suce un de ces types dont j'ignore la tête. J'ai le pouvoir, j'ai une bouche, j'ai des mains, je caresse, je soulève, je malaxe, je malmène, je soulage. Ma clé ouvre des abîmes. Les femmes sont plus rares. Apparemment je ne les intéresse pas. Elles ont tort, mais je ne peux pas les y obliger. Leur drogue, leurs bijoux, elles les gardent et les observent. Dans les tiroirs, sous les dessous, on planque les colliers de mamie ou d’un ex comme un souvenir, une marque dans la chair. Les hommes s’en foutent. Les hommes ont une capacité à l’oubli. Et puis le soir vient, je regagne la rue et les hauts murs. La clé bien au fond de mon sac, je respire la ville noire.

Grand merci à Anne-Sophie

Et que sont les VASES COMMUNICANTS ?
Emprunté à Pierre Ménard, car pourquoi dire mal ce qui a été si bien dit :

« François Bon Tiers Livre et Jérôme Denis Scriptopolis sont à l’initiative d’un projet de vases communicants (au départ cela s’appelait le Grand dérangement, pas peu fier d’avoir trouvé ce titre de vases communicants) : Le premier vendredi du mois, chacun écrit sur le blog d’un autre, à charge à chacun de préparer les mariages, les échanges, les invitations. Circulation horizontale pour produire des liens autrement… Ne pas écrire pour, mais écrire chez l’autre.
Beau programme qui a démarré le 3 juillet 2009 entre les deux sites, ainsi qu’entre Fenêtres / open space d’Anne Savelli et Liminaire. 

Si vous êtes tentés par l’aventure, faîtes le savoir sur le mur du groupe Facebook des vases communicants

Merci à Marie-Noëlle Bertrand d’avoir repris le flambeau.


jeudi 2 avril 2015

Les vases communicants avril 2015 (42) : Sébastien de Cornaud-Marcheteau

Dans le cadre des vases communicants d’avril 2015

Ne pas écrire pour, mais écrire chez l’autre...

L’aventure du 1er vendredi du mois d’avril 2015 est ici.


Aujourd’hui, j’ai le plaisir d’accueillir 

Sébastien de Cornuaud-Marcheteau 

dont les mots sont habituellement ici.

Exceptionnellement, ses mots et une de ses photos se trouvent là, juste en-dessous.

A Matisse,


C’est comme si soudain, c’était l’été.
Le soleil au zénith, la chaleur accablante se serait violemment affaissée dans le camping. Une torpeur de sable et de brindilles séchées. Une chaleur de garrigue, un jour sans vent. Il ferait trop chaud, alors on aurait posé le ballon et abandonné toute prétention à taper dedans, à le pousser dans les cages, à jouer des pieds et des coudes. On aurait proclamé le mitan des heures, réclamer la fin de toute prolongation, on aurait dit pouce ! Pause ! On boit !
Souffles coupés, pouces levés, regards torves de chiens de faïence dans l’attente d’une trêve réciproque ; puis, l’ayant trouvée, on aurait couru, de toutes nos forces, vers les sanitaires où résonnaient déjà les claquements des boutons poussoirs. Le filet d’eau fraîche sur les lèvres sèches, sur le visage, dans les cheveux. Filet qui deviendrait vite éclaboussures, éclats de voix, cascades de rires sonores sous les remontrances du gardien de ces lieux qui, du haut de son accent anglais, s’écrirait : « Please ! On ne joue pas dans le toilet block ! »
Mais nos ombres, à présent fraîches et vives comme des libellules, auraient déjà déserté les lieux pour rejoindre d’autres ombres, celles des thuyas, des chênes lièges et des potences de jeux.
C’est à cet endroit, précisément, que le monde entier se balancerait, quand il n’y aurait plus rien à faire, que la chaleur serait trop vive et la fatigue trop intense. La paix reviendrait, peu à peu, comme l’horizon, oscillant entre terre et ciel, par ajustements successifs, en pliant les genoux pour aller plus haut. On parlerait à voix basse, tête en arrière. On aurait l’impression, dans ce lent balancement, de percevoir les mille et un détails qui nous connectent au monde : le chatouillis des cheveux sur les paupières, le crissement du sable sous les tongues, le grincement lugubre des mousquetons au bout des cordes et, au loin, les cigales qui y répondent.
On resterait là, ensemble à se balancer, les uns après les autres. A attendre que le soleil s’incline, que la digestion lente se dissipe et qu’enfin, toutes les conditions étant réunies, on nous amène à la mer…


Grand merci à Sébastien

Si vous voulez lire mes mots, déposés à partir de la même photo, c’est ici.


Un petit coucou à Brigitte Célérier
Et un grand merci à Angèle Casanova d’avoir repris le flambeau et dont il faut saluer la somme de travail tout au long du mois pour rassembler tous les liens et nous gâter par ses enregistrements.


Et que sont les VASES COMMUNICANTS ?
Emprunté à Pierre Ménard, car pourquoi dire mal ce qui a été si bien dit :

« François Bon Tiers Livre et Jérôme Denis Scriptopolis sont à l’initiative d’un projet de vases communicants (au départ cela s’appelait le Grand dérangement, pas peu fier d’avoir trouvé ce titre de vases communicants) : Le premier vendredi du mois, chacun écrit sur le blog d’un autre, à charge à chacun de préparer les mariages, les échanges, les invitations. Circulation horizontale pour produire des liens autrement… Ne pas écrire pour, mais écrire chez l’autre.
Beau programme qui a démarré le 3 juillet 2009 entre les deux sites, ainsi qu’entre Fenêtres / open space d’Anne Savelli et Liminaire. 


Si vous êtes tentés par l’aventure, faîtes le savoir sur le mur du groupe Facebook des vases communicants