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lundi 9 mars 2015

Une photo, quelques mots (157), Chef Joseph

 

Le principe de cet atelier ?
Chaque mardi Leiloona publie une photo qui servira de base pour les textes. Une semaine pour l’écrire : les textes sont publiés le lundi matin.
Ni genre, ni ton imposés. Seul le plaisir d’écrire. Encore et toujours.

Pour voir les liens de tous les textes, rendez-vous ici.

9 mars 2015

Une photo, quelques mots (157)

Et voici la photo de cette semaine ! 
Pour cette nouvelle semaine, une photographie de Marion Pluss qui m’a tout de suite interpellée (aussitôt prise, aussitôt utilisée …)
© Marion Pluss




Aujourd’hui, ce n’est pas Aristide qui va raconter son histoire qui aurait dû commencer par :
« Je m’appelle Aristide.
Je suis biker et un vrai ! ».

Non, c’est moi, Chef Joseph, chef des Nez percés.
J’orne le torse d’Aristide depuis deux décennies. Les tours de machine à laver je connais mais pas assez à mon goût car parfois, Aristide, il est un peu léger question hygiène.

Quelle horreur, me retrouver imprimé sur le tee-shirt de ce biker !

Un biker, c’est lui qui le crie haut et fort alors que moi, je vous murmure à l’oreille (car elle en a des chevaux sous la selle sa monture) que c’est un motard du dimanche qui frime. Mais gardez-le pour vous, c’est entre nous. Pas envie de prendre encore une tache sur mon panache ou sentir dégouliner une bière brune le long de son torse … beurk beurk beurk !!!

Ce jour-là, un huit mars, je m’en souviens, car avec ses copains, ils n’ont fait que rigoler, boire, fumer et je ne vous dis pas tout. Ils célébrèrent à leur manière la journée de la femme.
Ses jambes commençaient à tituber et moi à tanguer, conséquence fort logique de la situation que j’estimais forte inconfortable et inconvenante. J’aurais voulu l’oublier au plus vite mais elle a été immortalisée par une inconnue qui passait par là.
Aristide l’avait remarquée tout de suite. Il lui lança quelques œillades ; elle resta de marbre tout à son travail.
Je rigolais intérieurement, les ballons d’essai de séduction à la biker tombèrent à plat et c’est peu de le dire.
Car franchement, moi, chef des Nez percés j’ai de l’allure ; mais lui il est large, plus que large.
Attendez, je vérifie sur mon étiquette 4XL. Je crois que cela veut dire quatre fois large. Essayez de vous imaginer.
Effrayant. Je me fais peur parfois quand je me vois dans la glace quand il se lave les mains, quand il se recoiffe… moi si svelte j’ai été dans la vraie vie, la mienne, pas la sienne.
Imaginez…

                          


lundi 2 mars 2015

Une photo, quelques mots (156), profession photographe de guerre

Le principe de cet atelier ?

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2 mars 2015

Et voici la photo de cette semaine ! 
Alors que vous raconte celle-ci ? Un ciel bleu après la neige … Un aperçu aussi du carnet de voyage de Funchal (il arrive aussi vite que possible.)
© Leiloona



Je m’appelle Bill.

Je suis photographe.

Ce midi, dans ma boîte aux lettres, pour changer des factures une carte postale de ma bonne amie, Annette.
Funchal… un appel aux vacances. Elle se la coule douce là-bas depuis… cinq ans déjà.

Quelle idée lui a encore traversé l’esprit !
Des vacances !
Ai-je le temps d’en prendre alors que le monde va mal.

Je m’appelle Bill.

Je suis photographe.

Photographe de guerre est ma profession mais il faut que je fasse le point sur ma vie.
Couvrir les conflits, courir le monde, tout cela devient au-dessus de mes forces depuis les visions d’horreur que les combattants kurdes à Kobané m’ont offertes.
J’ai envie de silence, de calme.
Envie de changer ma vie.

Alors pourquoi pas quelques jours de vacances à Funchal.
Merci ma bonne amie, Annette de cette suggestion.

J’ai 59 ans et je cherche un grand chêne centenaire, devant une maison dans laquelle poser enfin mes valises et me reposer.
Envie de me réfugier dans une tour au toit tout rond.
Envie de rejoindre Ulysse sur l’île d’Éole.
Envie d’entendre le Zéphir souffler et non plus les balles siffler.
Envie de photographier des baleines, dauphins, phoques moines et non plus des combattants poussiéreux et des morts.
Envie de m’extasier devant des camélias éclatants, envie d’un autre rouge sur mes photos.
Envie de laisser mes pensées s’envoler dans des nuages qui ne seraient pas obscurcis par l’explosion d’une maison, d’une école, d’un musée ou d’une usine.
Envie d’une cachette au bout du monde.

Je m’appelle Bill.

Je suis photographe.

Je veux photographier la vie sans la mort.

-       Allô, Annette, bonjour ma douce amie. Je t’ai écoutée ou plutôt lue. J’arrive. Je décolle de Nice le 7 mars à 17.45. Tu devras me supporter jusqu’au 30.
-      
-       Oui, tu as raison. Je repars le jour de mon anniversaire. J’ai une escale de douze heures à Lisbonne
-      
-       Pour embrasser Marion…
-      
-       À très très vite.

                                                    



dimanche 22 février 2015

Une photo, quelques mots (155), Dans la rue

 

Le principe de cet atelier ?

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23 février 2015

Une photo, quelques mots (155)

Et voici la photo de cette semaine ! 

© Romaric Cazaux

Je m’appelle Emily.

Vous ne me connaissez pas encore mais les quatre hommes sous le grand arbre, eux, me connaissent. Pas réellement, mais quand même.

Ma maman leur a donné ma photo car elle ne me retrouve pas.
En rentrant de son travail, je n’étais pas à la maison.
Elle m’a appelée. Elle a crié mon nom des centaines de fois.
Elle m’a cherchée pendant deux heures, a téléphoné à mes copines, à mes copains.

Elle n’a pas appelé mon père, car je n’ai pas de père ou plus exactement, je n’ai plus de père, il a disparu il y a maintenant trente-deux mois. Il nous manque à toutes les deux. On n’arrive pas à s’y faire. 
Son rire nous manque, ses plaisanteries un peu lourdes aussi. Sa présence…

Comme je ne répondais pas à ma maman sur mon téléphone portable, elle a été au poste de police.

« Ne vous inquiétez pas, elle ne doit pas être très loin. À la nuit, elle va rentrer. Ne vous inquiétez pas, Madame ».

Mais ma maman s’inquiète. Elle s’alarme toujours et encore plus depuis que Papa est parti.

Eux, les quatre policiers, viennent de parcourir la grande cité où j’habite.

Eux non plus, ils ne m’ont pas retrouvée.
Ils n’y ont pas mis beaucoup d’énergie non plus.
Je le sais, je les ai vus faire. 
Leur porte à porte n'était ni fait ni à faire.

Ils auraient dû pousser dans la rue d’après, dans la rue où vit celui que j’aime.
Mais c’était trop loin peut-être pour eux.

Je voulais juste attendre que le soleil revienne pour sortir de ma cachette.



lundi 9 février 2015

Une photo, quleques mots (154), Ne pas faire dans la dentelle

 

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9 février 2015

Une photo, quelques mots (154)

Et voici la photo de cette semaine, elle est de Romaric Cazaux ! 

Ne pas faire dans la dentelle.
  
Je m’appelle Lace.

Un drôle de prénom me direz-vous. Mais très classe, moi je trouve. En plus, pas courant de ce côté de l’Atlantique.
Il est vrai que si mes parents m’avaient appelée Dentelle, cela aurait été dur à porter. L’officier d’état civil n’aurait pas accepté, Dentelle, inconnu dans sa liste des prénoms permis, fort heureusement.
Mes futures condisciples, même en maternelle, auraient pouffé de rire. J’aurais eu du mal à échapper, plus tard, au sobriquet de crêpe.
Heureusement, ils choisirent la traduction anglaise.
Moi, Lace… j’adore. Je me sens unique.

Dans la salle d‘attente de mon dentiste préféré, façon de parler, je feuilletais un magazine vieux de plus de trois ans.
Mon regard s’arrêta sur cette photo


© Romaric Cazaux

Je ne pus m’empêcher de dire à la jeune femme en tenue légère :
« Mademoiselle, il fait froid. Couvrez-vous… »
Cela me fit sourire de m’adresser à cette jeune femme quelque peu dénudée, placardée sur le côté de cette cabine téléphonique de Toronto.
Mais je ne pus me retenir ; elle me faisait trop froid. J’en tremblais pour elle et me mis à éternuer dix fois de suite, sans que rien ne l’ait laissé prévoir.

Cela eut le don de m’emporter ailleurs et tout d’un coup, j’entendis cet étrange monologue :
« Allô ! Allô !!! Je suis trempée !
L’homme au balai, rendez-vous à 19 heures, pour un petit verre. Cela nous réchauffera.
L’homme au parapluie, osez me regarder, je ne vais pas vous dévorer.
Trois flocons de neige, ils détournent leur regard.
Attention, le poteau !!! L’homme au téléphone vous allez éclater votre arcade. Du sang sur la neige, cela fait désordre. »

Mais tout cela fut interrompu, trop rapidement, par un tonitruant
« Mademoiselle Lace Martin, c’est à nous »
Les hostilités étaient déclarées.




lundi 26 janvier 2015

Une photo, quelques mots (152), Inès et Jorge


Le principe de cet atelier ?

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26 janvier 2015

Une photo, quelques mots (152) - ma 47ème  participation 

Et voici la photo de cette semaine ! 


© Julien Ribot


Inès et Jorge

Arbre, je suis, arbre, je le resterais.
Malgré toutes les blessures infligées par ces maniaques du canif, du poinçon, de l’opinel, du…. de l’arme, oui osons dire le mot, de l’arme qui me blesse et me marque à jamais, je survis et je reste debout.

Maudit le jour, où cet individu, le premier, a tracé ce cœur maladroit sur mon tronc. Il fallait un premier graffiteur, ce fut celui-là.
Il grava, dans ce cœur malhabile, deux prénoms Inès et Jorge[1].
Je ne sais même plus quand il osa me mutiler. Il a oublié de mettre la date. Je n’étais pas à une blessure près. Naïf, je croyais qu’elle serait seule et unique et non reproduite. Que diable !

Reprenons le cours de ce récit, sur ce geste premier qui a fait de moi, un homme. N’importe quoi, je suis un arbre et je le demeurerais[2].

Pst, Inès et Jorge… peut-être des étrangers d’ailleurs… je me mis à imaginer qu’ils venaient d’Espagne et de Grèce en raison de ces drôles de prénoms que je n’avais jamais entendus. Je voulais pouvoir les excuser. C’était une coutume chez eux, je supposais.

Je me souviens parfaitement d’eux.

C’était une nuit d’hiver.
Leur couple venait du pont tout là-bas, celui qui brille toujours de mille feux, comme si chaque lampadaire était entouré d’un halo.
La rumeur des voitures ne venait pas jusqu’à moi.
J’ai eu le temps de les observer, lors de leur promenade vers moi.[3]
Je les entendais rire, je les voyais se frôler, je les entendais respirer, je les voyais arriver près de moi… quand soudain, il la plaqua contre mon tronc encore intact[4] et… il lui murmura à l’oreille des mots que je ne pus entendre… mon âge me rendant un peu dur de la feuille.
Elle, une grande fille aux yeux bleus clair tout habillée de noir avec des cheveux noirs de jais lui descendant presque aux genoux. Ils me chatouillaient d’ailleurs, mais je ne m’en plaignais pas. Cela changeait des malotrus qui, parfois, soulageaient leur vessie contre moi, et pas que des mal élevés à quatre pattes.
Lui ressemblait à un lutin farceur. Sa tenue bariolée me le faisait croire échappé d’un cirque, celui-là même qui s’était installé non loin de l’avenue que j’avais l’honneur de border avec ma dizaine de frères.
Il lui serrait la taille, avec un air conquis et conquérant à la fois.
Ils continuaient de rire, se collaient à moi, joignaient leurs mains en m’entourant quand soudain, ils s’arrêtèrent.
Il lui dit quelque chose, je crus entendre « à la vie, à la mort ».
Il sortit de je ne sais où, un canif au corps nacré et à la lame acérée et commença à m’entailler. Oui, à me pénétrer. Je souffrais, mais il ne m’entendit pas crier, me plaindre.
Il appuya de toutes ses forces, s’appliqua en gravant d’abord ce I, dont il oublia le point, puis ce N, puis ce E avec cet accent qui me fit trembler et ce S.
Il se recula, contempla son œuvre. Je crus mes souffrances terminées, mais non, il continua. Son prénom apparut sur mon corps puis, sans arrêter, il cisela ce cœur d’une seule traite.
Je ne décolérais pas après cet outrage à mon intégrité.
Il prit une photo, dix photos, emportant un morceau de mon âme. Il était fier de lui. Sur une des photos, elle embrassait mon tronc, plutôt l’hommage à leur amour[5], qui avait intérêt d’être éternel.
Je versais une larme qu’ils ne virent même pas.
Cet affront ne dura pas plus de cinq minutes.
Je me remettais à peine de mes émotions, je cicatrisais à peine quand… un autre individu recommença.
Un, puis deux, puis dix au fil du temps.

Quand j’avais trop de chagrin, je rêvais au temps où j’étais choyé dans la pépinière de Monsieur Du Platane dans mon énorme conteneur en bois.
Mais un jour, on me mit avec un certain nombre de mes congénères sur un immense plateau. Le camion roula, roula, une éternité. Je fus secoué, j’eus mal au cœur.
Je me retrouvais dans une grande ville.
Je me l’étais bien dit, que me planter sur cette avenue était plus que dangereux. J’avais rêvé d’être transporté par un énorme bras de grue rouge au dernier étage d’un immeuble surplombant la Seine. Je vous l’accorde, elle n’est pas loin.
Mais je rêvais de la voir d’en haut, de vivre sur un toit… et non au ras du caniveau.
Là-haut, personne ne m’aurait estropié.


                          






[1] Neuf lettres au total qui m’ont remué les entrailles. Heureusement, certains suivants ne graveront que leurs initiales. Mais revenons au tout premier temps de ma souffrance.
[2] C’était une façon de parler. L’Arbre, tu n’as aucun humour !
[3] Qu’aurais-je pu faire d‘autre d’ailleurs.
[4] Tout de suite les idées mal placées ou grivoises
[5] Maigre réconfort après cette offense