dimanche 22 mai 2011

L'atelier du dimanche (4), L'énigme des perroquets, sans regret


L’atelier du dimanche, l’atelier d’écriture de Skriban


Une nouvelle aventure


Sans regret…


Kelly-Anne lui avait encore fait des reproches, ce matin quand elle lui avait demandé de se dépêcher. En effet, elle voulait prendre la route rapidement, rêvant d‘aller errer dans ce petit village dont ses inséparables copines lui avaient vanté les petites boutiques, toutes plus charmantes les unes que les autres.
Il paraît qu’il y avait des découvertes à faire et qu’ils iraient de surprise en surprise.
Elle voulait s’en mettre plein les yeux.
-       Quentin, hier, tu étais d’accord pour que nous partions de bonne heure. Qu’est-ce que tu peux être lunatique ! aller, active-toi ! que nous en profitions. J’ai réparé le pique-nique et déjà tout mis dans la voiture.
-       Hier, c’était hier. Me faire lever si tôt un dimanche matin pour aller traîner dans des ruelles mal pavées, rentrer dans des magasins sans aucun intérêt alors que j’aurais pu…

Il préféra capituler et ne poursuivit pas sa phrase. Il ne souhaitait pas voir sa mine boudeuse et supporter sa mauvaise humeur toute la journée.

Il reconnut intérieurement qu’elle avait toujours de bonnes idées, mais il se serait bien gardé de lui dire. Cela faisait partie de leurs jeux amoureux.

Ils prirent la route. Une heure après, il dut reconnaître que le spectacle en valait le coup. Comment avaient-ils pu passer à côté d’un tel lieu lors de leurs promenades dans l’arrière-pays. Pourtant ils sillonnaient depuis maintenant plus de trois ans les alentours. Les amies de sa Clémence n’avaient pas menti. Pour une fois, elles avaient été de bon conseil.
Heureusement qu’il n’avait pas oublié son appareil photo, au moins cela l’occuperait pendant qu’elle courrait d’échoppe en échoppe.
On se serait cru dans un village de poupées ou dans un paysage de carte postale.
Le soleil était de la partie. Dès ces premiers jours de printemps, un parterre d’au moins mille anémones accueillait les visiteurs. Des anémones de toutes les couleurs. Un vrai régal pour les yeux.

Il ne devait pas la lâcher des yeux, car, comme d’habitude, elle volait d’un lieu à un autre. Elle semblait sans arrêt danser, virevolter. Les nombreuses années de danse classique qu’elle avait faites lui avaient donné une grâce sans pareil. Il la vit comme transformée en statue devant la devanture d’un magasin s’appelant « L’Étoile de mer ».
Que venait-elle de découvrir qui la laisse sans voix, comme pétrifiée.
Étoile, mer, dans quel songe était-elle encore perdue ? Pas devant l’étal d‘un poissonnier, elle n’aimait pas manger de poisson.
Alors devant quelle vitrine était-elle arrêtée ?
Elle, si iconoclaste, ne pouvait s’être arrêtée devant un magasin de bondieuseries. Le nom écrit en grandes lettres bleues n’aurait pas correspondu d’ailleurs au contenant.
Il s‘approcha et resta comme elle, admiratif devant cet étalage de tissus bayadères. Jamais, il n’avait vu un tel échantillon de couleurs. Tout semblait digne de la caverne d’Ali-Baba. Il lui prit la main et ils pénétrèrent dans ce drôle de magasin.
La découverte de tout un univers coloré et d’objets disparates s’offrit à leurs yeux, qui durent s’habituer à cette semi-obscurité. Il ne semblait y avoir personne dans ce lieu dédié aux rayures.
Elle ne savait plus où donner de la tête.
Ses yeux allaient des couvertures, où elle s’imaginait s’enrouler les soirs d‘hiver devant la cheminée aux couvertures des cahiers et divers autres calepins. Il y en avait de toutes les tailles. Du plus petit, qu’elle pourrait sans peine glisser dans son sac pour noter ses pensées au fil de l’eau au plus grand, où elle se voyait déjà coller les nombreuses photos ou récoltes de leurs promenades.
Elle regrettait de ne pas avoir pris son immense cabas pour rapporter sa future récolte.
Mais elle devait être raisonnable et ne pas se laisser emporter par toutes ses envies.
Il la regardait en souriant et en définitive, pas mécontent d’être là. Ils échangèrent un sourire complice.
Elle continua de l’observer du coin de l’œil et le surprit en train de toucher, presque caresser de grands coupons aux camaïeux de bleus, qu’elle verrait bien transformés en rideau dans son bureau. 
Il prit son air primesautier et lui mit dans les bras cinq pièces de tissu.
-       Tiens, pour faire coussins, rideaux, et tout ce que tu imagineras pour mon bureau.
Ils s’étaient compris sans même se parler.
-       Aller, laisse-toi aller. Prends des cahiers, des pochettes, des classeurs. Faisons-nous plaisir. On mangera des pâtes le reste du mois.
Heureusement qu’elle aimait les pâtes et il ne restait plus que neuf jours pour être le 1er juin.


PS : texte écrit sur la proposition de Gwenaëlle,
le 22 mai 2011 – seule modification, désormais Elle s’appelle Kelly-Anne et Lui, Quentin.

N.B.
L’énigme des perroquets – Quentin Kelly-Anne
Photo crédit ©Ernesto Timor



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