L’atelier du dimanche, l’atelier d’écriture de Skriban
Une nouvelle aventure,
Il
y avait dans son regard un mélange de tendresse et de douleur, une lumière
propre à ceux qui vivent la vie avec infiniment plus d’acuité que les autres.
Et soudain, je me suis rappelé notre première rencontre et
la lumière que j’avais vue dans ses yeux verts.
Tout à fait par hasard, nous nous étions croisés dans ce
village qui pour nous était, le village de l’exil, loin, trop loin de notre
région natale. Il m’avait bousculé, tout à fait involontairement, sur le marché
ce fameux mardi 32 octobre. Les allées n’étaient pas très larges sur ce marché provençal
où je n’allais disons que trois ou quatre fois dans l’année.
Ce jour-là, ma vie a changé.
Mon panier a répandu son contenu par terre. Je riais jaune, mais,
en voyant sa tête, je me suis mise à rire franchement. Il m’a aidée à ramasser mes
pommes de terre égaillées ainsi que mes pommes en l’air.
Sa réflexion m’a clouée :
-
Des reinettes de chez moi
-
De chez moi aussi.
Et la conversation s’est terminée autour d’un café pour lui,
d’un chocolat pour moi, sur la place du marché.
C’était il y a maintenant presque cinq ans.
Et aujourd’hui, il a monté le chemin. Il avait eu soudain envie
de temps pour nous, comme il dit. Trop peu souvent à mon goût.
J’ai
posé deux assiettes sur la table.
J’ai
posé deux assiettes sur la table.
Les deux survivantes du service de table du dimanche de grand-mère
que j’ai reçu en héritage. J’y tiens comme à la prunelle de mes yeux. Juste
deux survivantes des cinq qui restaient quand le partage a été fait.
Elles ont presque cent ans. Elles en auraient des choses à
raconter.
Grand-mère m’avait dit qu’elle les avait reçues en cadeau de
mariage de son frère, son cher grand frère Paul.
Ce frère si mystérieux qui hante, trop souvent à mon gré mes
moments d’écriture. Je voudrais tant écrire sur lui. Je garde précieusement les
lettres que ce grand-oncle Paul lui a écrites pendant la Grande Guerre. Je n’ai
toujours pas pu les lire. Elles sont dans la boîte aux secrets.
-
Tiens, pourquoi ressors-tu ces assiettes-là
aujourd’hui ?
-
Ce sont celles de grand-mère. Et je suis sûre
qu’elles sont liées de près à l’oncle Paul. Je crois me souvenir que j’ai une
photo de lui en militaire
Il
a hésité un moment et il a dit, J’aimerais juste retrouver cette photo.
Il
a hésité un moment et il a dit, J’aimerais juste retrouver cette photo.
-
De quelle photo parles-tu ?
-
De celle des sucettes en gare de Saint-Étienne
-
Je ne vois pas le rapport entre les assiettes et
les sucettes
-
Si… rappelle-toi
Saint-Étienne, l’hôtel en face de la gare, le repas.
Tes yeux qui brillaient, tes fossettes, la fossette au creux
de tes reins.
Nos éclats de fous rires.
Le temps qui passait trop vite.
L’insouciance des moments hors du temps.
C’était quand déjà…
Presque deux ans… notre deuxième escapade…
Je n’arrivais pas à détacher mes yeux des siens.
Je m’y noyais.
Je m’y raccroche encore aujourd’hui.
-
Je ne sais pas…
Si
tu dis que tu ne sais pas, c’est que tu acceptes.
PS : texte écrit sur la
proposition de Gwenaëlle, le 8 mai 2011 – seule modification, désormais Elle
s’appelle Kelly-Anne et Lui, Quentin
N.B.
L’énigme des perroquets – Quentin Kelly-Anne
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