lundi 31 octobre 2011

Une photo, quelques mots (14), Deniela et son accordéon


Grâce à Leiloona et à sa proposition du

25 octobre 2011


Une photo, quelques mots (14)


Cette semaine sera musicale ! 
Après un visage assez anxieux, voici celui de l'ombre, à vous de l'imaginer. 


Faceless Accordeonist - Cette photo a été prise le 3 septembre 2009.


Tous les textes ici
Deniela et son accordéon

Elle a tout juste 40 ans.
Elle s’assoit sur le banc de pierre devant la maison de sa grand-mère.
Elle reconnaît sa chance, celle-ci est toujours de ce monde.
Elle vient se faire consoler comme quand elle était petite.
Elle en a passé ici, des jours et des jours de joyeux moments.

Elle a tout juste 40 ans.
Elle est arrivée il y a un petit mois.
Elle sait qu’elle va pouvoir rester tout le temps qu’elle veut.
Elle se sent mieux, elle reprend des forces, jour après jour.
Elle aime s’asseoir tous les soirs sur le banc de pierre.

Elle a tout juste 40 ans.
Elle se souvient …


Elle a cinq ans.
Ce sont les vacances d’été.
La maison est vivante d’une bonne douzaine de cousins et cousines.
Leurs parents respectifs les ont abandonnés pour les deux mois.
Pépé François et Mémé Charlotte en ont la garde.

Elle a dix ans.
Pépé François continue de respecter chaque soir de vacances d’été le même rituel.
Il s’installe sur le banc de pierre avec son piano à bretelles.
Les enfants se posent sur leur séant en demi-cercle devant lui.
Il affiche un immense sourire et commence à jouer.

Elle a quinze ans.
Elle a beaucoup grandi et veut apprendre à jouer de l’accordéon.
Pépé François accepte.
Commencent les moments les plus heureux de ses vacances.
Elle fait ses gammes, plie sous le poids de l’accordéon.

Elle a vingt ans.
Elle revient toujours passer ses vacances ici.
Maintenant, c’est elle qui joue tous les soirs d’été.
Pépé François ouvre le bal des notes puis lui passe le relais.
Elle a appris à la ville à jouer toutes sortes de mélodies.

Elle a…

Elle a 32 ans.
Pépé François s’éteint.
Elle joue de l’accordéon à l’église.
Elle joue de l’accordéon pour son dernier voyage.
Elle n’emporte pas l’accordéon, elle reviendra.


Elle a tout juste 40 ans.
Elle s’est souvenue…
Elle est revenue quand son amour l’a quitté.
Elle s’est assise sur le banc de pierre devant la maison de sa grand-mère.
Elle joue tous les soirs de l’accordéon.

Pépé François la voit, l’encourage.
Elle joue, joue jusqu'à ne plus sentir son dos.
Elle joue, rejoue les morceaux qu’il lui a appris.
Elle devient l’accordéoniste avec un grand A.
Elle a tout juste 40 ans.



dimanche 30 octobre 2011

Les Impromptus Littéraires (6), Que fait la pluie ?



Ma participation aux Impromptus littéraires

Du dimanche 30 octobre 2011

Ces jours derniers, bien à l’abri dans nos intériorités nous n’avons pas eu à endurer les caprices de la météo : voilà qu’ici le ciel reste bleu et sans nuages depuis trop longtemps, gare à la sécheresse ! Là-bas il tombe des cordes et les inondations sévissent.


Les textes sont ici

Que fait la pluie ?

Drôle de question.
Elle flotte…

Si mon cœur est en mille morceaux,
La pluie fait des claquettes
Sous musique et mots de Claude Nougaro.
Au « Salut, pourquoi tu pleures »
Je réponds
« Parce que je t'aime, salaud ».



Si mon moral est au beau fixe,
La pluie tombera sur moi
Sous musique et mots de Sacha Distel[1]
Et je me dirais
« Qu’après la pluie…
Vient le beau temps. »

Drôle de question.
Elle crachine.
Que fait la pluie ?






[1] Paroles: Hal David, Fr: Maurice Tézé. Musique: Burt Bacharach   1969 Titre original: "Raindrops keep fallin' on my head" © MCA Caravelle

Pour Asphodèle, 42 ans trop tard... Gabrielle Russier


Pour faire suite au texte de ce dimanche d’Asphodèle

ci-joint un texte écrit en décembre 2008

à l’invitation de Sylvie Combe, L’écrit plume à Toulon

dans le cadre d'un travail conduit par Jean-Claude Grosse (texte paru page 119 du livre)

L'affaire Gabrielle Russier, 40 ans après

Les contraires et visions croisées

Un ange passa…

Mon passé se dissout
Je fais place au silence
Paul Éluard

Je suis un des murs de la cellule qui abrita les jours de détention de Gabrielle Russier.
Je me souviens et pourtant, parfois, j’aurai tant voulu ne pas entendre, ne pas voir. J’aurais tant voulu m’écrouler pour lui ouvrir le chemin de la liberté.
Je suis sûr que les fissures que vous pouvez voir encore mes pierres sont dues à ses cris, qui venaient de je ne sais où. Elle hurlait en silence, elle pleurait en silence, elle ne mangeait plus.
Elle était devenue une ombre.
Peut être que dans un autre monde, elle aurait pu me traverser et serait partie le rejoindre.

Un jour, on la poussa dans cette pièce.
Pièce, réduit, prison, lieu d ‘incarcération, enfer, porte de la mort.
Trois mètres sur trois… et encore, je ne sais plus. Imaginez.

Elle m’a touché,
Elle m’a griffé,
Elle m’a frappé
Elle s’est écroulée contre moi,
Elle s’est adossée à moi
Et je ne pouvais rien faire
Je ne savais pas pourquoi elle était là.
Donc, il a fallu que je tende l’oreille.
Je voulais savoir.
Pleins de questions à lui poser. Mais elle ne répondait pas.

Elle pleurait en silence
Elle criait en silence
Elle écrivait en silence
Elle pensait en silence
Elle mourrait en silence.

Petit à petit, les langues se délièrent.
Qui m’en parla en premier ?

Le gendarme qui l’amena à la prison des femmes des Baumettes. Il était gauche, se dandinait d’un pied sur l’autre et s’appuya contre moi. De nombreuses pensées s’agitaient dans sa tête. Il ne savait pas qui elle était. Mais elle avait l’air d’avoir de l’importance. Il y avait eu des journalistes, des photographes à son arrivée.
Il refusait de savoir.
Une de plus ou de moins qu’il conduisait aux Baumettes. Elles étaient toutes innocentes, elles le disaient toutes, elles n’avaient rien fait.
Plus tard, il apprit la triste fin de l’histoire en lisant le journal. Il reconnut son visage de jeune femme perdue dans ce monde. Elle avait été là parce qu’elle aimait le métèque.
Mais fallait-il croire les journaux ? les journaux disaient qu’elle avait tort : cela ne se faisait pas.

Il n’y pensa plus. Il oublia.

Mais quinze ans plus tard…
Sa fille lui en parla, lui demandant s’il avait croisé Gabrielle Russier dans l’exercice de sa fonction.

Il éluda la question.

….

Tiens, une voix féminine, celle de la gardienne qui lui déposait ses repas : elle avait un cœur, elle compatissait, ne comprenait pas, ne condamnait pas mais ne s’émouvait pas. Les autres détenues se jetaient sur la nourriture. Elle, elle ne mangeait pas.
Combien de fois l’ai-je entendu maugréer.

Mais Gabrielle, vous permettez que je vous appelle ainsi…

J’avais fini par savoir votre nom…

J’aurais du être votre chat, vous savez celui que vous avez pris la peine d’aller déposer chez votre voisine ce trop triste matin du 1er septembre 1969.
Ce matin où vous avez choisi de partir car c’était trop dur de ne plus pouvoir enseigner, de ne plus l’entendre vous appeler « Qatino », trop dur de ne plus pouvoir aimer au grand jour.

Vous avez choisi de « mourir d’aimer ».




Mon futur se lève, j’hurle.

Je suis un autre mur de la cellule qui abrita les jours de détention de Gabrielle Russier.

Encore une qui va venir graver sur moi qu’elle est innocente.
Une erreur qu’elle soit là…
Elle grave un prénom : Christian et jour après jour creusent les lettres. Elle en se rend pas compte qu’elle me blesse, que je saigne.
Encore une qui va me taper dessus avec sa tête, jusqu’à s’en étourdir et s’affaler en mon soubassement.
Encore une qui va m’agonir d’injures alors que je n’y suis pour rien.

Et vlan ! je me prends son assiette, elle me gratte encore avec sa fourchette : un peu de respect.

Elle ne croit pas que je vais m’écrouler pour lui ouvrir les voies de la liberté : 200 ans que je suis debout. Ce n’est pas, elle, ce petit bout de femme qui viendra à bout de moi.

Elle marche de long en large, s’écroule, se relève, repart, compte ses pas, compte les carreaux, ne lève même plus la tête vers le trou de lumière.

Je l’entends marmonner, elle me prend la tête.
Je voudrais me boucher les oreilles. Elle m’épuise. Sa litanie est e plus en plus lancinante, ses mots de plus en plus lourds de sens.
Seul moment de répit pour moi, quand la fatigue, la terrasse, quand elle se pelotonne sur la couche pour pleurer silencieusement.
Mais je l’entends quand même. Elle me saoule.

Elle croit qu’elle va pouvoir m’émouvoir…
Et bien non. 200 ans que j’entends des cris et si rarement des rires.

Je n’en peux plus des plaintes des occupantes de ma pièce, de mon lieu.
Elles arrivent, survivent, repartent.

Je suis toujours là.
J’en aurais des choses à raconter…




samedi 29 octobre 2011

Chez Asphodèle, les mots en I (9), Histoire d'eau



LES PLUMES DE L’ANNÉE 

 

- 9 – LE RETOUR ! Collecte des mots en I



Tous les textes sont ici


Histoire d'eau.

Ce n’était pas possible. Le réveil marquait 5.32 et le téléphone sonnait à tue-tête.

-       Théodule, arrive à mon secours immédiatement. Je baigne dans l’eau.

Irréfragable, un tel argument de si bon matin.

C’était Donald, mon ami de toujours… ou presque car la suite des événements risquait de faire changer la donne.
Ni une, ni deux, je me levais, m’habillais prestement et me précipitais chez lui.
Dix ans que nous habitons dans le même chemin, dix ans que nous affrontons les mêmes orages, dix ans que rien de tel ne s’est produit.

L’inondation de sa maison viendrait de l’eau qui a ruisselé dans mon chemin. C’est tout du moins ce qu’il laissait entendre dire.
Il est dans tous ses états. Itou pour moi.

-       Mais, essayais-je de balbutier, je ne suis pas responsable de l’eau qui tombe.

Si d’après lui, tout était de ma faute.
J’en suis encore tout retourné.

Je ne vais pas mettre cela sur l’ivresse des montagnes ou des profondeurs.
Le point culminant du village où nous habitons est à peine à 532 mètres.
Donc cette excuse ne peut être.
Que lui est-il arrivé de s’en prendre à moi de cette façon ?

Lui, qui se dit infatigable a été mis sur les genoux par les 5 cms d’eau qui ont osé pénétrer dans sa maison, sans sa permission.
Il maintient que c’est ma faute, que je reste les bras ballants, que je ne l’aide pas.
Il va bientôt m’accuser d’en avoir fait exprès.

Et aujourd’hui, la catastrophe.

Nous habitons tous les deux au bout d’une impasse, lui 332 mètres avant moi.

Un ruisseau d’eau de pluie, dont je refuse la propriété, en raison de l’orage, a filé tout droit dans sa cuisine, sa chambre, ses toilettes, enfin dans toute sa maison.

-       5 cms, tu te rends compte, et tout cela, de ta faute.

Cela recommence. Je le vois encore m’invectiver.
Rien de risible dans tout cela. C’est mon ami, je ne peux me permettre de sourire.

Mais, sans que je l’aie vu arriver, comme dans un dessin animé, j’ai vu sa maison en pleine immersion, comme pour un baptême.
Les images ont défilé. Cela m’a fait sourire. Vous savez ce petit sourire en coin, l’air de se moquer sans en avoir l’air.
Quelque chose d’indicible.

De plus, ce jour-là, pas d’interstice à la pluie, pas le moindre rayon de soleil. Le déluge, toute la journée.

J’ai eu droit à tout. Au nom d‘oiseaux, d’être traité d’incapable, d’imbécile. Le tout par un ami de 30 ans. J’ai failli y perdre mes dernières illusions. De quoi inhumer notre belle amitié.
Cela de la faute d’un orage, de trombes d’eau et de sa très méchante humeur, chose qu’il n’admettra jamais. Je ne l’avais jamais vu aussi inconstant.

Mais peut-être était-il victime d’une indigestion avant le coup de froid qui le guettait, l’humidité rentrée dans sa maison aidant.

Il était d’un naturel assez imaginaire mais là, tout dépassait son entendement.

Tout d’un coup, une autre facette de son personnage apparaissait : il pouvait être très irréfléchi.




Voici les 16 mots en I collectés aujourd’hui pour la reprise automnale des Plumes de l’année  (ex Plumes de l’été):
illusion – irréfragable – ivresse – infatigable – impasse – immersion – image – indicible – interstice – imbécile – itou – inhumer – inconstant – indigestion – imaginaire – irréfléchi.


Les plumes de l'année (1) Christine, Le retour en I


LES PLUMES DE L’ANNÉE  - 9 – LE RETOUR !


Les mots de Christine,
de tout là-bas en Chine

Indigestion de la foule
imbécile et infatigable
de laquelle je m’extirpe.
Un car bleu.
Un car bleu, le 88.
Ivresse de l’aube bleue
Tu traces Bougainville,
Traces dans ton bleu de garage
Le moteur tourne, le chauffeur grogne.
J’inhume le petit matin, le jour est maintenant plein
Les travailleurs encore en immersion dans leur nuit de sommeil
Et toi tu traces le couloir, tu es en retard.
L’odeur de  la savonnette quand tu passes tout près,
Ivresse de vacances simples, de maison de campagne, de moi avant d’être vieille.

Je t’offrais tous les jours  un mot simple,
un  bonjour, que, dans cette foule stupide, j’étais la seule à te dire
Et toi tu m’en as proposé un autre,
un mot que je ne voulais plus entendre,
et qui était pour toi totalement irréfragable.

Mon pauvre Itou,
Tu te berçais d’illusion, quand moi j’entrevoyais l’indicible,
l’impasse dans laquelle je n’ai pas osé aller me fracasser.
Esprit d’occidentale 
La raison d’abord
Contre irréfléchi esprit du Marabout
Mon pauvre Assou des Comores
L’imbécile n’était pas la foule
L’imbécile c’était moi

Et mon imaginaire inconstant qui me jouait sans cesse des tours,
Parfois oui, parfois non
Absolue irrésolution.

Je ne vois plus ton visage que dans l’interstice de mes rêves,
Et j’aimerais bien être au petit matin.
Même si ton oreille était un peu coupée,
Même si tu boitais un peu,
Et revoir ton image à travers la vitre du car bleu.

Signé ©Christine



Voici les 16 mots en I collectés aujourd’hui pour la reprise automnale des Plumes de l’année  (ex Plumes de l’été):
illusion – irréfragable – ivresse – infatigable – impasse – immersion – image – indicible – interstice – imbécile – itou – inhumer – inconstant – indigestion – imaginaire – irréfléchi.

lundi 24 octobre 2011

Rdv avec un mot (14), psychose


  


Lundi 24 octobre 2011 : psychose

P
Comme Psychose, 47ème long-métrage réalisé en noir et blanc par  Alfred Hitchcock
Voilà à quoi ce mot me fait penser.
Évident mon cher Watson, allez-vous penser… on a les références qu’on peut et les souvenirs qu’on veut.
Non mais !!!
Vous l’avez vu vous aussi ce film, j’en suis sûr.
Mais savez-vous que le tournage de la fameuse scène de la douche prit 7 jours, demanda 70 prises pour seulement 45 secondes à l’écran.
Je vais vous surprendre : ce fut du coulis de chocolat qui joua le rôle du sang.
Content de moi !

S
Comme schizophrène dont
Isaac Newton et sa pomme ;
Vincent Van Gogh qui aurait peut-être été assassiné, d’après les travaux publiés récemment par deux américains après la consultation de 28 000 documents ;
Antonin Artaud et ses 400 cahiers d’écolier et plus ;
Et aussi Syd Barrett, fondateur du groupe de rock psychédélique Pink Floyd,
En sont des exemples célèbres.

Y
Comme la génération Y…
Cela a plus de classe que de vous parler du chromosome Y, celui des mâles
La génération Y, vous ne connaissez pas… vous n’êtes pas au top.
C’est la génération des personnes nées entre 1980 et 1999, celles symbolisées par le fil de leur baladeur s’affichant sur leur torse à partir de leurs deux oreilles…

C
Comme confusion mentale, synonyme de psychose
Bon passons à autre chose… car je vais être traumatisé pour la journée, pire pour la semaine ou jusqu'’à la fin de l’année…

H
Comme hallucination,
Comme si je voyais des Schtroumpfs dans mon jardin à la place de Trèfle et de son harem

O
Comme obsession
Et ne rajouter pas comme celle du 32 octobre par exemple
Ce n’est pas une obsession ! c’est la vérité, cela approche…

S
Comme spectre…
Je fuis me cacher sous les draps. J’ai peur des fantômes.
Hou hou !!!

E
Comme e…. e…
Comme éternuement…
Mince, ce n’est pas moi qui éternue, je suis seul dans la pièce…

Au secours !



Rdv avec un mot (3) Christine, Psychose




 

Les mots de Christine,
de tout là-bas en Chine

 


Lundi 24 octobre 2011 : psychose



Ciel.
Rodent les dernières mouettes, envol  Plané

Terre.
Un homme blond
Etrange étranger
Les yeux immobiles,
Egarés de bière
Est installé dans sa soirée.

Tournent autour les broyeurs du plastique
Les arracheurs de métal,
Les rapaces du carton
Le blond est cerné
Système de défense interne et organique,
Clanique.
Apparence dissociée, manège réglé.

L’homme est convoitise
Ses yeux cillent, ses pupilles s’animent.

Des pépites d’or
tout près de son visage
lui sourient dans la nuit
Bourdonnement dans les tympans

Tout ça tourbillonne autour de lui,
Un frisson le parcours,
Un Souffle dans le cou,
Une main le frôle

Plus de canettes sur la table
La nuit soudainement vide
Main dans la poche
Plus de liquide.




Signé 
©Christine