dimanche 25 mars 2012

Une photo, quelques mots (33), un chapeau de paille


 

Sur proposition de Leiloona

 

 

20 mars 2012

Une photo, quelques mots (33)




Ce vendredi matin, soudain devant moi, j’ai reconnu le chapeau de paille, ce chapeau de paille avec sa bande ajourée si caractéristique. Cela faisait combien… vingt ans que je ne l’avais pas vu. Mais cela ne pouvait être que lui, car il était unique.
Je me sentais attiré. Pire, mon regard était comme aimanté par ce chapeau de paille qui avait traversé tant d'années sans moi. Il était ressurgi du passé comme un diable de sa boîte. Sous ce chapeau, cela ne pouvait être qu’Elle, mon grand amour que j’avais dû quitter, abandonner en moins de temps qu’il ne faut pour le dire.


Ce vendredi matin, comme tous les autres matins, j’ai pris le métro.
Toujours le même, le 10.32, toujours à la même station.
Je le prends tous les jours de ‘l'année, maintenant depuis trois ans, depuis que je suis à la retraite. Un moyen, comme un autre, pour moi de rester vivant après la vie agitée que j'ai parcouru.


En vingt ans, j’ai beaucoup changé.
Ce vendredi matin, je peux paraître un peu lourd au premier abord, mais ne vous fiez pas aux apparences, j’ai battu des fieffés coquins à la course. Ils ne m’ont pas échappé longtemps, mais c’était il y a une dizaine d’années. Je ne paie pas de mine, je le sais et cela m’importe peu. Ma tenue préférée, cette chemise chamarrée ou l’une de ses sœurs, taille 4XL, je vous l’assure. J’aime être à l’aise. Ma démarche est mal assurée parfois, ma hanche gauche quand le temps est à la pluie, comme aujourd’hui, me fait ralentir ma marche. J’ai toujours l’habitude de trimbaler, au bout de mon bras, un sac en plastique.


Il y a vingt ans, quand je ne suis pas retourné vers le chapeau paille, je me suis enfui avec juste un sac Tati à la main. Ses carreaux roses et blancs continuent de hanter mes nuits, très régulièrement et surtout le 45 qui était dedans et que j’ai toujours au fond d'un tiroir chez moi.


Ce vendredi matin, je n’ose plus bouger de peur de rompre le charme. Car, je dois rêver, ce n’est pas possible. Le temps semble s’être figé. Mon regard est hypnotisé par le chapeau de paille, qui semble sans âge. Je crains qu’il ne devienne trop pesant. La rame est presque vide. Je décide d’avancer.
Je vais dépasser le chapeau de paille et qu’elle n’est pas ma surprise : vingt ans, après, sous le chapeau de paille, une jeune fille, copie conforme de celle que j’ai quittée, il y a vingt ans.



3 commentaires:

leiloona a dit…

Oh, on flirte avec le fantastique ce matin ? :D

patriarch a dit…

Un peu de retour en arrière ? belle journée Amicalement

Mathylde a dit…

J'ai trouvé ton texte émouvant!