samedi 9 août 2014

Chez François Bon - atelier d'été 2014 - Outils du roman : 6, ce que personne se saura du personnage

De plus en plus accro à cette idée d'écrire, d'écrire
grâce encore à Claude Simon.

C'est ici


Gabrielle


L’arbre aux branches toujours aussi enchevêtrées cache une partie de la devanture de la crêperie ; il aperçoit le pan d’une grande jupe noire habillée d’un tablier blanc, bordé de dentelle. Il ne manque que la coiffe, pour faire croire qu’un coin de Bretagne s’est installé en Provence.

Que fait-elle là : elle a repris l’ancienne boulangerie de ses parents ; elle représente la quatrième génération ; l’Italie est de plus en plus loin dans ses gènes ; des odeurs de pain au chocolat, de chaussons aux pommes lui reviennent aux narines ; elle a tout transformé et a réalisé son rêve d’enfance, elle la passionnée de la forêt de Brocéliande, du Roi Arthur et de la pointe du Raz : ouvrir une crêperie ; mais dans un coin, il reste toujours un étal réservé aux pains de toutes sortes. Qui les façonne et en régale le village ?

Que cherche-t-elle à prouver : que les rêves d’enfant peuvent se réaliser ; il suffit de le vouloir très fort, de convaincre son banquier, une chance son compagnon également, cela aide ; elle va, vient, redresse un bouquet de fleurs ; elle vérifie l’harmonie des bleus des nappes ; elle rayonne ; il a envie de l’appeler, il a envie de la prendre dans ses bras ; il a envie d’effacer les quinze ans d’absence.et ce sourire, toujours le même. Et toujours le même geste pour relever sa mèche rebelle, toujours la même.

« Les Billig et Rozell de Gabrielle », il faudra qu’il ose pousser la porte de la boutique, que tient maintenant la secrète amoureuse de ses quinze ans, qu’il quitta sans un au-revoir. Il faudra aussi saluer Grand Pierre, le maire réélu de son village de naissance et son compagnon. Sourire, sourire, mais est-ce que cela sera possible ?


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