Sur une idée d’Olivia,
Des mots, une histoire 48
Les
mots de Christine,
de
tout là-bas en Chine
Suite
de
chez Eiluned, des éditions 43, 44, 46,
47 d’Olivia
V I– Histoire de Rimma Ryskaïa
Le médiocre repas avait
assouvi son angoisse pour quelques instants.
Puis, elle s’était concentrée
sur la descente : plus bas, la mer sombre et attractive, s’étendait
infinie.
Maintenant, dos appuyé contre
un pilier, le mouvement lent et hypnotique du tapis vomissant les bagages la
laisse dans un état flottant. Surgit soudain de la bouche noire sa valise, dont
l’autocollant entérine son origine : lion et serpe d’or, blason de sa
ville. Sa valise donc, retombe lourdement dans un bruit assourdit sur les
lattes de caoutchouc tournantes tandis que de l’autre côté, le sourire sincère
de sa voisine de voyage s’imprime dans sa mémoire.
Une fois la porte vitrée
franchie, visages scrutateurs et papiers nominatifs lui font face violemment,
et bien sûr, de Rimma : rien. Luttant contre la douleur et la rage qui la
transpercent, Terechka rappelle à ses nerfs le sourire mémorisé .C’est décidé, il serait le canot de sauvetage de
ses moments désespérés.
Claquement du coffre se
refermant sur sa valise, claquement de la porte se refermant sur elle,
battement accéléré de son cœur, le taxi soupe-au-lait démarre. L’adresse est
donnée, plus de marche arrière possible. Dehors, les palmiers se plient, c’est
ça le mistral ?
Dans sa main, la photo bien protégée de Rimma, année 82.
Débarquée sans ménagement, la
voilà devant la porte d’un immeuble niçois à la façade ocre.
Personne ne répond lorsqu’elle
appuie plusieurs fois son doigt ganté sur la dernière sonnette.
Il est tard, il fait froid, le
vent ne faiblit pas, elle est fatiguée, se sent défaillir et n’a qu’une envie, se coucher.
Elle recule un peu, détaille
les alentours, et aperçoit, planqué derrière la fenêtre gauche du rez-de-chaussée, un gros chat tigré au
regard suspicieux.
Instinctivement Terechka, dont
l’univers est peuplé d’animaux symboliques, succombe encore une fois aux lois
de l’anthropomorphisme. Ce chat l’invite à frapper, elle en est persuadée, elle
l’entend l’appeler.
Pendant quelques instants,
elle se revoit dans l’atelier de son grand-père, elle tout petite, à genoux sur
un haut tabouret, les coudes sur l’établi. Alors que sur le sol les copeaux
tombaient et s’amoncelaient en tapis odorant, naissait entre les mains du vieil
homme à l’animalisme convaincu, la tête d’un ours ou d’une gazelle. Seuls, le
raclement des outils engendraient une petite musique contemporaine, faite de
frottement et tintement métallique.
Oui, de l’autre côté de ce
carreau semble régner une si douce chaleur d’hiver qui lui rappelle ces moments
là, passés dans l’intimité de l’atelier.
La porte d’entrée s’entrouvre
brusquement, un jeune garçon sort en
courant, la bousculant au passage. Profitant de cette ouverture, Terechka
rentre dans le hall de l’immeuble et frappe à la porte de gauche.
Le visage d’une femme asse
jeune apparait dans l’encadrement. De l’intérieur un souffle chaud se dépose
sur son visage glacé. Encore une fois, pense-t-elle la chaleur, humaine ou
matérielle, vient à se manifester… De ce
qu’elle suppose être la cuisine, Terechka perçoit le sifflement si caractéristique d’une
bouilloire et, lasse de tout ces signes compromettant ses humeurs en incessants
aller-retour, elle sent à nouveau s’abattre ce désir très fort et vital d’aller
dormir, de tout remettre au lendemain.
Les mots imposés pour l’édition 48
de Des mots, une histoire sont :
pilier – autocollant – mistral – défaillir – canot – photo –
anthropomorphisme – gazelle – soupe-au-lait – sincère – assouvir – dormir –
vent – souffler – bouilloire – désir – chaleur d’hiver – animalisme – douleur
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